Dépendance à l'escalade : Peut-on être accro à la grimpette ?
Nous pouvons légitimement nous demander si cette sensation de manque lorsque nous ne sommes pas en train de grimper est la résultante d'une certaine dépendance. Au cours de nos recherches, nous avons pu prendre connaissance de nombreux récits de grimpeurs qui racontent leur dépendance à l'escalade et l'escalade de cette dépendance...
Cette notion de dépendance peut aller jusqu'à engendrer des comportements proches de ceux des personnes souffrant d'addictions plus connues (alcool, tabac, médicaments, drogues, jeux d'argent, sexe, etc.). Il est normal de commencer à parler d'addiction lorsque l'on grimpe cinq fois par semaine, que l'on commence à organiser toute sa vie autour de sa pratique, que le moindre voyage est réfléchi pour permettre de grimper, que l'on fait face à un changement d'humeur important lorsqu'une sortie est annulée pour une question de conditions météorologiques... Des comportements pourtant tout à fait évocateurs dans d'autres situations, mais que l'on a plus de mal à attribuer à notre pratique sportive favorite.
Pourtant, il est depuis longtemps prouvé scientifiquement que l'endorphine libérée lorsque l'on pratique du sport de manière intense est bel et bien un antalgique naturel de longue durée qui se rapproche de la morphine, une substance bien connue pour engendrer une très forte dépendance physique et psychologique.
Cette forme d'addiction liée à une pratique excessive du sport est reconnue comme une maladie depuis 2011 par l'OMS, et porte un nom : celui de la bigorexie. "Big" pour grand et "Orexis" pour appétit, un grand appétit pour le sport. Professionnels comme amateurs, de nombreux sportifs sont concernés.
Si l'OMS reconnaît la bigorexie comme une maladie depuis 2011, le concept a été théorisé dès 1985 par William Glasser. Pour lui, l'addiction est manifeste lorsqu'il y a "un besoin irrépressible et compulsif de pratiquer régulièrement et intensivement une ou plusieurs activités physiques et sportives en vue d'obtenir des gratifications immédiates, et ce, malgré des conséquences négatives à long terme sur la santé physique, psychologique et sociale".
Le grimpeur bigorexique recherche donc tout simplement cette sensation de bien-être provoquée par les endorphines, ce qui entraîne un cercle vicieux puisque les endorphines viennent masquer les douleurs et permettent donc de se surpasser dans l'effort.
Maintenant que c'est une maladie reconnue, il est tout à fait possible d'en tenir compte et surtout de se soigner. L'objectif d'un traitement est de redonner une place normale à l'activité physique et de retrouver la notion du plaisir (et non de répondre à un manque). Cela peut se faire par le biais d'un spécialiste en addictions, d'un psychologue ou d'un psychiatre.
À noter que cela implique en premier lieu d'accepter de regarder cette dépendance et d'accepter de la nommer ainsi... Mais si vous lisez cet article, c'est peut-être que vous êtes sur la bonne voie pour reconnaitre que vous avez un problème 😅.